Trouver une solution à un conflit grâce à la méthode des six chapeaux

Médecin et psychologue maltais, Edward de Bono (1933-2021), a publié un grand nombre d’ouvrages sur la créativité.  Une de ses méthodes célèbres est celle des « six chapeaux de la réflexion », un concept simple à retenir pour regarder les différents aspects d’un problème. Cette méthode mérite d’être utilisée en résolution des conflits, quitte à adapter son côté « ludique ».  

Joshua Coleman /Unsplash

Comment ça marche ?

Edward de Bono compare sa démarche à la visite d’une maison : si elle est regardée par plusieurs personnes placées à des endroits différents, l’un ne verra que la façade côté rue, l’autre l’accès au jardin, le troisième l’un des côtés etc. Chacun est naturellement persuadé que sa vision est la bonne.

Au contraire, si le groupe se réunit et se déplace ensemble pour faire le tour de la maison, ils auront tous vu les mêmes aspects en même temps.

La méthode d’Edward de Bono consiste pour les participants en une exploration coopérative d’un problème, selon 6 « modes de pensée » qu’ils vont aborder  ensemble et simultanément et qui sont représentés symboliquement par des « chapeaux » de couleurs différentes :

  • Le chapeau blanc : les participants analysent l’aspect factuel (données, informations, chiffres objectifs),
  • Le chapeau rouge : les participants abordent l’aspect émotionnel subjectif (sentiments, valeurs, intuitions…),
  • Le chapeau vert : les participants cherchent l’aspect créatif sans censure (idées nouvelles, originales, provocatrices),
  • Le chapeau noir : les participants regardent l’aspect négatif (risques, faiblesses),
  • Le chapeau jaune : les participants regardent l’aspect positif (vision optimiste, espoirs),
  • Le chapeau bleu : les participants se focalisent sur le processus, l’animateur fixe le cadre et organise la discussion, reformule ou synthétise, il assure le respect des règles fixées.

A noter :

  • Lorsque l’animateur fait appel à un aspect, tous les participants réfléchissent uniquement à cet aspect,
  • Dans cette méthode, rien n’est juste ou faux : les différents aspects sont posés « en parallèle »,
  • Les chapeaux correspondent à des angles de vue et non pas à des personnalités, ni surtout à des rôles attribués.

Comment adapter cette méthode à la résolution des conflits ?

Dans le contexte du conflit, l’usage même symbolique de chapeaux, par son côté excessivement ludique, peut sembler incompatible avec la situation de personnes – sauf si elles sont familiarisées avec la démarche.

Toutefois, le concept de couleurs associées à des aspects d’un problème est intéressant pour aborder le problème dans sa globalité en évitant de laisser s’installer une attribution systématique d’un rôle dans la dynamique des médiés (« le critique », « le rationnel » etc.).

Il permet aussi de sérier les problèmes sans oublier aucun aspect, de conserver un certain équilibre (les « critiques » ne sont pas muselés mais ont l’occasion aussi de réfléchir autrement et de n’être pas cantonnés dans un rôle habituel, de même pour les « optimistes »), de réfléchir seul, à deux ou en groupe, et surtout regarder ensemble dans la même direction.

En médiation par exemple, on peut adapter la méthode comme suit :

  1. Identifier le problème particulier à traiter
  2. Disposer de cartes de couleur blanche, rouge, noire, jaune, verte, bleue – éventuellement inscrire l’aspect concerné sur chaque carte
  3. Idéalement, préparer en amont la succession des séquences : les médiés ont-ils besoin d’exprimer des émotions fortes, de présenter des données brutes ? Edward de Bono suggère de commencer en phase rouge lorsque le sujet est fortement affectif puis de placer une phase blanche plus objective. Le médiateur peut ainsi avec l’expérience développer de véritables stratégies de séquençage, y compris de passage par une phase bleue pour laisser les participants s’exprimer sur le déroulement et le processus, les priorités etc.
  4. Introduire par une explication du principe : lorsqu’une carte est sortie, les participants recherchent ensemble tous les éléments qui correspondent. Au besoin, si une idée leur vient qui correspond à un autre mode, ils l’écrivent à part
  5. A l’issue d’une phase « verte », il sera nécessaire de prendre chaque idée et de la passer au tamis de l’évaluation, d’abord d’une phase jaune, puis d’une phase noire voire blanche de retour aux faits et enfin rouge pour valider qu’elle suscite une adhésion affective
  6. Le cadrage, la reformulation et la synthèse se font en phase bleue que le médiateur peut matérialiser par la présence de cette carte près de lui car étant neutre mais garant du processus, il n’intervient qu’en « bleu ».

L’affichage des cartes de couleurs peut être utilisé aussi en dehors de tout séquençage, simplement pour matérialiser l’état d’esprit recherché (exploration d’idées, retour aux faits, émotions, évaluation etc.).

Avec cette méthode accessible et mémorisable, le médiateur peut mettre en œuvre facilement les principales composantes de toute séance de créativité, de la pose du problème (blanc/rouge) à l’alternance entre pensée divergente (chapeau vert) et pensée convergente (évaluation positive en jaune ou négative en noir), facilitation et animation (chapeau bleu).

A lire : E. de Bono, Les six chapeaux de la réflexion, Eyrolles, 2017, 1ère édition 1985


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